À 37 ans, Thomas Delpech est un jeune dirigeant de fondation guidé par le besoin d’agir et convaincu que le mécénat est une voie pour l’avenir. Issu de la communication et ancien représentant syndicaliste, il rejoint Up en 2004 et est amené à prendre les commandes du mécénat du Groupe en 2017, pour ses engagements et ses aspirations fortes. Depuis un an et demi, il s’investit dans la transformation de la fondation du groupe Up – 18 ans sous égide avant de devenir fondation d’entreprise fin 2017 – avec l’objectif de coopérer pour redonner du pouvoir d’agir aux populations invisibles.
Un communiquant engagé
Après une formation de Conseil et Marketing en école de commerce (EMLV), Thomas Delpech s’est dirigé naturellement vers la communication, d’abord en agence média puis chez Coca-Cola où il travaillait à la valorisation des marques. Ne trouvant pas l’aspiration dont il avait besoin, il quitte le géant américain pour rejoindre le Groupe Up en tant que responsable de communication interne. Très vite, il découvre la dimension coopérative, avec un mode de management différent – plus ouvert et souple, moins vertical – cette fois en adéquation avec ses inspirations familiales : « Ma mère était syndicaliste et mon père engagé en politique, j’avais donc dans mon entourage des gens engagés pour le collectif, à des niveaux différents et pour des publics différents. En entrant dans une coopérative, on devient acteur d’un système collectif, avec un partage d’information, la possibilité de dialoguer et d’être écouté, et des objectifs dont le sens est pensé collectivement ! » lance-t-il.
Ce nouvel environnement de travail réveille chez Thomas Delpech l’envie d’agir au service des autres. Au bout d’un an, il décide de s’engager syndicalement, d’abord comme simple élu, puis en tant que responsable du Comité d’Entreprise. « Cette responsabilité demandait de l’écoute, de la bienveillance, et la capacité à ‘‘échanger et négocier’’ avec la direction pour discuter et faire avancer l’intérêt collectif, tout en continuant à accompagner les problématiques individuelles, explique-t-il. En 14 ans chez Up, j’ai eu 12 ans de mandat ! Ce n’est pas rien… ».
Au fil des années, et malgré ses compétences professionnelles, il trouve de moins en moins de sens dans le métier de la communication. « Si bien que mon équilibre dans l’entreprise a été de conjuguer ce métier avec l’engagement syndical ». En 2013, il évolue en rejoignant la direction des relations extérieures. « On m’a proposé de reprendre la fondation en complément de la gestion des partenariats. Ce fut un grand tournant pour moi car au-delà de mon engagement interne, je vivais enfin à travers mon emploi, l’engagement de mon entreprise vis-à-vis de l’extérieur ! ».
La Fondation Up : redonner du pouvoir d’agir aux invisibles
En 2013, à son arrivée aux commandes de la Fondation Up sous égide de la Fondation de France, elle entrait dans sa 14ème année d’existence. Soutenant l’intérêt général au sens large, près de 2,5 millions d’euros avait déjà été versés à environ 600 projets. « À l’époque, nous étions moins structurés dans notre approche du mécénat et travaillions à moyens réduits : avec moins d’un équivalent temps plein dédié à la fondation, nous ne pouvions ni aller sur le terrain, ni suivre un projet sur plusieurs années ou le financer au-delà des 10.000€. La fondation avait aidé de nombreux projets, mais ça manquait de suivi, d’échanges avec les porteurs de projets et d’évaluation des actions menées », explique Thomas Delpech.
Dès lors, en interne, une réflexion participative est impulsée sur ce que doit être le mécénat et l’engagement pour un Groupe comme Up et rapidement, la fondation s’oriente vers un changement de statut. « Nous avons opté pour la fondation d’entreprise, qui permettait une réelle appropriation du mécénat, plus d’autonomie dans l’action, mais surtout plus de sens, car elle impose un cadre structurant : des statuts, un programme, une vision et une ambition, des moyens d’action financiers et humains… » À l’issue d’un travail collaboratif de 18 mois mêlant la Fondation, les directions RSE, RH et Communication, ainsi que des consultants extérieurs, la Fondation du groupe Up s’est fixée une ambition partagée à 5 ans, celle de ’‘redonner du pouvoir d’agir aux populations invisibles’’, en redonnant accès à quatre leviers essentiels : l’alimentation, le logement, l’éducation et la culture, ainsi que la santé.
En parallèle, Thomas Delpech constitue une équipe de trois personnes pour structurer une politique de mécénat globale et la faire vivre au sein du Groupe. « L’idée était d’insuffler un même élan vers lequel tous nos pays convergeront. Une manière de donner le sens de la coopération et de l’intérêt général dans toutes nos entités ! », indique-t-il. Cette ambition collective et partagée répond ainsi à quatre critères :
– Chaque projet est accompagné pour 3 ans minimum. « Car l’engagement est avant tout un lien durable : de l’écoute, de la proximité, du suivi. De plus, pour aider à la création d’un projet d’intérêt général, son développement ou encore son essaimage, il faut au moins 3 ans ! »
– Le financement ne dépasse jamais 50% du budget d’un projet. « Afin de garantir l’autonomie de la structure, s’assurer qu’il y ait d’autres acteurs autour de la table, encourager le co-financement…
– La mobilisation des collaborateurs, qui n’intervient jamais avant un an. « Car il faut qu’une relation de confiance entre les acteurs se soit établie. »
– L’évaluation et la mesure d’impact, pour donner du sens à l’action. « C’est encore une voie exploratoire pour nous mais tellement primordiale, c’est une pierre angulaire pour apporter la preuve que le mécénat de Up est utile dans les territoires et que l’intérêt général mérite d’être soutenu par tous les acteurs économiques ! »
En parallèle, le mécénat de l’entreprise bénéficie désormais d’un double levier : d’un côté la fondation, qui porte l’ambition de tout un Groupe, structure l’action et apporte son soutien en régie directe ou en co-financement de projets sélectionnés par les filiales Up partout dans le monde. Et, de l’autre côté, les filiales du groupe Up, qui font la démonstration locale ou nationale de cette ambition, en s’engageant avec leur propre budget, selon un processus d’action commun et en mettant en place un binôme référent : le DG accompagné d’un salarié qui donne de son temps pour instruire les projets. « Pour résumer, nous sommes passés d’une posture d’intérêt général très large, où l’on aidait un peu tout de manière très embryonnaire, à une posture beaucoup plus proactive, motivée et encadrée, pour qu’ensemble, notre action ait de l’impact. Un sacré challenge, car il a fallu tout revoir de fond en comble ! Mais cette mécanique nouvelle correspond à une belle ambition qu’il faut maintenant porter haut et fort » soutient Thomas Delpech.
Pour un mécénat d’impact
In fine, Thomas Delpech partage pleinement l’évolution de la fondation car il croit avant tout à un mécénat d’impact. « Un mécénat où l’on agit ensemble au service d’une cause, où on ne place pas ses moyens tous azimuts, mais vers des acteurs référents capables d’embarquer les organisations connexes. Où l’on évalue l’action en fonction d’une ambition forte et non d’indicateurs sur un résultat attendu. Un mécénat d’anticipation, où l’on réfléchit en amont et en concertation – sans se focaliser uniquement sur le prochain Conseil d’Administration décisionnaire – pour proposer une véritable accompagnement dans la durée. »
Au-delà de la fondation, Thomas est convaincu que le mécénat d’entreprise est une voie pour l’avenir. Selon lui, l’entreprise a un rôle à jouer parce qu’elle est à la croisée des chemins entre les individus, territoires, collectivités, associations… « D’autant plus pour un groupe comme le nôtre, où l’utilité collective est présente dès l’origine ! » s’exclame-t-il. En effet, le fondateur du Groupe Chèque Déjeuner, Georges Rino, était un syndicaliste et un humaniste. Dès 1964, il choisissait le statut de coopérative, pour être dans le partage plutôt que dans l’enrichissement personnel. « Notre Groupe a dans ses gènes le fait d’agir différemment. Il exprime sa différence par son modèle économique, sa façon d’entreprendre et de gérer l’humain, mais aussi par les leviers de la RSE, son modèle de gouvernance, son impact sur les territoires… Up est reconnu dans le secteur de l’ESS pour son activité au service du mieux-être et du lien social. Mon rêve absolu serait que, demain, il le soit aussi pour son mécénat, et que les salariés soient autant valorisés pour leur travail quotidien que pour leur engagement au profit de l’intérêt général, pour une société plus inclusive, proche, responsable et collaborative ! » Voilà qui est dit.
Propos recueillis par Alicia Izard
[…] plus sur cette Fondation, n’hésitez pas à découvrir sur http://www.mecenova.org, le portrait de Thomas Delpech, responsable mécénat du Groupe et Délégué Général de la […]