Les entreprises pour la Cité, EY et le CFF ont dévoilé, le 13 octobre dernier à la Défense les résultats de la cinquième édition conjointe du Panorama des fondations et fonds de dotation crées par des entreprises mécènes. A l’occasion de sa sortie, Fatem-Zahra Bennis de l’association IKAMBERE, Frédéric Dohet de la Fondation RTE et Sophie Pouget de la Fondation RAJA-Danièle Marcovici ont pris la parole lors d’une table-ronde afin d’aborder les évolutions du secteur depuis une décennie et de dresser des perspectives de développement.
Par Les entreprises pour la Cité, EY, et le Centre Français des Fonds et Fondation.
Publié tous les deux ans, le Panorama des fondations et des fonds de dotation créés par des entreprises mécènes est une étude réalisée conjointement depuis 2014 par les équipes du réseau Les entreprises pour la Cité et d’EY, avec pour objectifs d’analyser les dynamiques à l’œuvre dans le secteur.
Après avoir abordé le rôle des fondations dans un monde ou les entreprises sont de plus en plus engagés en 2020, l’édition 2022 du Panorama s’intéresse cette fois à l’évolution du secteur depuis une décennie d’action et à perspectives de développement dans les années à venir. À l’occasion de cette 5ème édition, Le Centre Français des Fonds et Fondation s’est joint aux équipes de l’association Les entreprises pour la Cité et d’EY pour apporter son expertise.
Un engagement à long terme, ancré dans les territoires
Depuis 2014, les champs prioritaires d’engagement sont restés remarquablement inchangés, se concentrant sur les enjeux de développement humain : l’action sociale, l’éducation et l’insertion professionnelle (respectivement 75 %, 63 % et 57 % des réponses en 2022).
88 % des répondants à l’enquête déclarent soutenir leurs porteurs de projet de manière pluriannuelle. Une tendance en augmentation (+12 points depuis 2014) qui témoigne de l’acquis d’expérience des fondations et fonds d’entreprises en la matière. En effet, pour que les projets puissent porter leurs fruits, les structures bénéficiaires doivent pouvoir être soutenues suffisamment longtemps et disposer d’une bonne visibilité budgétaire.
Cet accompagnement plus pérenne s’accompagne aussi d’un ancrage dans les territoires, notamment dans l’Hexagone, mouvement qui s’est accentué au cours de la dernière décennie. 73 % des structures ont tenu compte cette année de l’implantation géographique de leur entreprise fondatrice pour sélectionner leurs projets, une tendance stable depuis 2020.

Un renforcement des liens stratégiques entre la fondation et son entreprise fondatrice
Les éditions successives du Panorama des fondations illustrent le renforcement des liens stratégiques entre la structure philanthropique et l’entreprise fondatrice. 58 % des structures sont désormais rattachées à la présidence/direction générale, alors qu’elles n’étaient que 37% en 2020 et 22% en 2018.
Le fait que la majorité des structures ait un objet social en lien avec l’activité de l’entreprise fondatrice (58 % en 2022, +3 points depuis 2020) concoure également à ce rapprochement.
Par ailleurs, ce renforcement des liens stratégiques se traduit également par des collaborations plus fréquentes entre les fonds et fondations et le département RSE de l’entreprise, quand celui-ci existe.

La révolution du mécénat des compétences
Les structures philanthropiques créées par les entreprises ne pratiquent pas uniquement du mécénat financier. En 2022, 56 % d’entre elles proposent du mécénat de compétences et 38 % du mécénat en nature. Dans leur ensemble, 66 % ont même recours à plusieurs formes de mécénat.
L’évolution la plus importante concerne en particulier le mécénat de compétences. La part des fondations et fonds qui proposent aux collaborateurs de l’entreprise de s’engager en faveur de l’intérêt général s’est considérablement accrue pour atteindre 80 % en 2022 (+17 points entre 2014 et 2022). Cette forme d’engagement constitue désormais la modalité juridique la plus plébiscitée par les entreprises mécènes devant les missions de bénévolat réalisées sur le temps libre des collaborateurs (25 %).

Des interactions accrues et variées avec l’écosystème
Les fondations et fonds d’entreprises travaillent rarement seuls. 94 % d’entre eux soutiennent le tissu associatif et la plupart sont en lien avec d’autres acteurs de l’écosystème et des acteurs publics de proximité.
Pour beaucoup, ces structures aimeraient explorer la possibilité de mutualiser leurs ressources au service d’un impact plus large et d’expérimenter de nouvelles manières de contribuer à l’intérêt général (71 % d’entre elles en 2022). En effet, libérées des contraintes de rentabilité, elles peuvent tester et éprouver de nouvelles modalités d’engagement.
Le mécénat collectif fait notamment partie des pistes explorées pour cofinancer ou même cogérer des projets avec des structures qui travaillent sur le même périmètre ou sur un sujet connexe, ou encore avec d’autres acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS).

Une décennie d’action : quel bilan et quelles perspectives ?
A la suite de la présentation des chiffres clés du Panorama, trois acteurs du secteur, à savoir Fatem-Zahra Bennis, Directrice adjointe de l’association IKAMBERE, Frédéric Dohet, Délégué général de la Fondation RTE et Sophie Pouget, Déléguée générale de la Fondation RAJA-Danièle Marcovici ont pris la parole lors d’une table-ronde afin d’aborder les évolutions du secteur depuis une décennie et de dresser des perspectives d’évolution.
En introduction, Fatem-Zahra Bennis a souligné que la flexibilité et la réactivité dont ont fait preuve les fondations lors de la crise sanitaire sont de bonnes pratiques à préserver. Par la suite, elle a rappelé qu’au fil des années, les associations se sont développées pour répondre à des problématiques de plus en plus nombreuses. Mais paradoxalement, les subventions publiques n’ont pas été adaptées aux besoins grandissant des associations. Dans ce contexte, le soutien financier des fondations est devenu crucial pour le monde associatif.
L’accompagnement extra-financier, qu’il prenne la forme de mécénat de compétences ou en nature s’est également développé, permettant ainsi d’apporter une réponse globale aux enjeux des associations. Cependant, la recherche de fonds reste la priorité pour les acteurs de terrain. “L’accompagnement extra-financier permet de créer des liens uniques et de renforcer la confiance entre les acteurs, mais le mécénat financier ne doit pas être délaissé pour autant” a précisé Fatem-Zahra.
Frédéric Dohet a pris ensuite la parole au nom de la Fondation RTE, une structure philanthropique dédiée au développement économique et social du monde rural. Après avoir confirmé les propos de Fatem-Zahra sur l’importance du mécénat financier, Frédéric Dohet a évoqué l’accompagnement extra-financier comme un moyen de s’adapter aux besoins spécifiques de chaque partenaire. A titre d’exemple la Fondation RTE fait parfois don de véhicule son entreprise fondatrice à des associations.
Toutefois, il reconnait qu’une fondation ne dispose pas toujours des ressources pour répondre à l’ensemble des demandes d’un partenaire. Face à cette situation, il est possible de solliciter l’écosystème de la fondation afin de trouver un acteur capable d’apporter un soutien complémentaire.
Suivant cette logique, le mécénat collectif devient une piste intéressante. Cependant, Frédéric Dohet prévient “Le mécénat collectif c’est d’abord de la complexité. Il faut se mettre d’accord sur de nombreux points cruciaux : les valeurs, le processus d’action, les résultats attendus etc..”
La Fondation Raja, qui mène des actions de solidarité et de mécénat dédiées à l’émancipation des femmes, en France et à l’international, a fait le choix de l’action collective en intégrant des groupements d’acteurs telle que la Coalition pour l’action des femmes en faveur de la justice climatique fondée par Onu Femmes ou encore la Coalition française des fondations pour le Climat créé par le CFF. L’efficacité des actions de plaidoyer de la fondation repose sur l’union d’acteurs internationaux mais également sur la coopération avec des structures locales. “La fondation remonte et centralise le plaidoyer des associations de terrains “ précise Sophie Pouget.
Pour clôturer la table-ronde, les 3 intervenants se sont mis d’accord sur les pistes de développement suivantes :
– Être à l’écoute des besoins des acteurs de l’intérêt général tout au long de l’année et ne pas restreindre le développement de partenariats à des appels à projets ponctuels.
– Allier un soutien financier et extra-financier pluriannuel afin de co-construire une relation dans la durée et permettre aux associations d’optimiser leur impact
– Avoir recourt au mécénat collectif si l’ensemble des acteurs sont suffisamment matures et si le contexte de l’entreprise le permet.
Retrouvez la synthèse de l’étude ici et l’intégralité du Panorama ici
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